Indemnités de licenciement : le Conseil de prud’hommes de TROYES s’affranchit des plafonds

Conseil de prud’hommes TROYES, RG N°18/00036 13 décembre 2018

 

Depuis l’instauration de la barémisation des indemnités prud’homales, validé par le Conseil constitutionnel le 7 septembre 2017, ce dispositif n’a cessé d’être critiqué tant sur le montant de l’indemnisation du préjudice du salarié que sur le pouvoir d’appréciation du juge prud’homal. 

 

En effet, désormais les salariés ne pouvaient obtenir qu’une somme maximale prédéfinie d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cette somme est calculée en fonction de l’ancienneté et du nombre de salariés présents dans l’entreprise. 

 

En raison du plafonnement des indemnités, cette barémisation a fait chuter le nombre de litiges prud’homaux en France d’après les statistiques.

 

Il faut savoir qu’au Conseil de prud’hommes de CLERMONT-FERRAND le contentieux prud’homal est passé de 

 

Le Conseil de Prud’hommes de TROYES 

 

En l’espèce, un salarié avait saisi le Conseil de Prud’hommes de TROYES d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat, afin d’obtenir les indemnités prévues au licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

 

Dans son argumentaire, son avocat demanda la non-application du plafond d’indemnisation pour licenciement économique, en soulevant l’inconventionalité du plafond indemnitaire. Le salarié soulevait le manquement de son employeur dans le paiement des salaires, de sa « mise au placard » par l’appauvrissement de ses missions confiées et d’une déloyauté contractuelle.

 

Ainsi, les juges prud’homaux ont estimé que ces faits justifiaient une résiliation judicaire du contrat de travail aux torts de l’employeur. 

 

De manière surprenante, les juges vont reconnaître « l’inconventionnalité du plafond fixé par l’article L. 1235-3 du code du travailet indemniser le salarié sans en tenir compte en fixant le montant de sa créance à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 9 mois de salaire » alors que le salarié ne pouvait prétendre qu’à 4 mois de salaire au plus.

 

Le Conseil de Prud’hommes indique que :
« L’article L1235-3 du Code du Travail, en introduisant un plafonnement limitatif des indemnités prud’homales, ne permet pas aux juges d’apprécier les situations individuelles des salariés injustement licenciés dans leur globalité et de réparer de manière juste le préjudice qu’ils ont subi.
De plus ces barèmes, ne permettent pas d’être dissuasifs pour les employeurs qui souhaiteraient licencier sans cause réelle et sérieuse un salarié. Ces barèmes sécurisent davantage les fautifs que les victimes et sont donc inéquitables. »

 

Ainsi, les juges ont estimé leur impossibilité d’apprécier la réparation du préjudice du salarié de manière juste et le caractère non-dissuasif des barèmes qui les rends inéquitables.

 

Les juges ont ainsi repris l’argumentaire du Comité européen des droits sociaux (CEDS) lors de sa décision du 8 septembre 2016 considérant le dispositif de plafonnement des indemnités de licenciement injustifié finlandais.

 

Cette solution est sujette à interrogations mais surprend par son aplomb. Les Conseil de prud’hommes en France adopteront peut-être la même position, en attendant que la Cour de cassation se positionne.  

 

Affaire à suivre !

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